Qui sont nos pollinisateurs?

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Dans un précédent article, nous avons discuté de la pollinisation — le transfert du pollen vers la partie femelle d’une fleur réceptive — et du fait que, puisque les plantes ne peuvent pas se déplacer, elles doivent faire appel à des vecteurs environnementaux pour y parvenir. Bien que plusieurs plantes utilisent le vent et l’eau, la vaste majorité se sert des pollinisateurs

On considère comme un pollinisateur tout organisme qui se déplace d’une fleur à l’autre, et transportant du pollen.

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L’abeille à miel

Pour plusieurs, parler de pollinisateurs évoque d’abord l’abeille à miel (Apis mellifera). Et ce n’est pas pour rien! Cette abeille domestiquée importée d’Europe est particulièrement bien adaptée aux besoins de notre système agricole.

Il est facile de déplacer des milliers, voire des millions, d’individus pour suivre les besoins en pollinisation de différentes cultures, et de diviser et multiplier des colonies. 

C’est un organisme extrêmement bien étudié; on connaît donc très bien son cycle de vie, ses besoins et ses maladies, notamment. 

Et tout ça en plus de produire des substances très prisées comme le miel ou la cire!

Abeille qui buttine
Crédit: Jon Sullivan, Public domain, via Wikimedia Commons

Qu’en est-il des autres pollinisateurs?

Il existe toutefois de nombreux autres pollinisateurs, autant des abeilles de toutes sortes que d’autres insectes, et même d’autres animaux! 

Plusieurs des pollinisateurs qu’on retrouve au Québec sont indigènes, c’est-à-dire qu’ils sont originaires d’ici et qu’ils ont donc co-évolué avec la flore et le climat local. C’est pourquoi plusieurs d’entre eux pollinisent plus efficacement certaines plantes que l’abeille à miel, ou alors pollinisent dans des conditions où cette dernière préfère rester à l’abri dans sa ruche.

Insecte pollinisateur qui buttine.
Crédit: Pixel.la Free Stock Photos

Les abeilles, pas seulement à rayures noires et jaunes

Beaucoup moins connues, de nombreuses espèces d’abeilles vivent à l’état sauvage. On retrouve quelque 730 espèces au Canada, dont plus de 375 au Québec et 192 rien qu’à Montréal

Avec une telle diversité vient toute une richesse d’apparences et de cycles de vie. Certaines sont noires, brunes, jaunes, vertes et même bleutées (Augochlora pura). Certaines mesurent aussi peu que 3 mm de long (Lasioglosses) et d’autres plus de 2 cm (Xylocopa virginica).

Plusieurs se nourrissent du nectar et du pollen de différentes espèces de fleurs, alors que d’autres sont spécialistes et ne butinent que les plantes d’une espèce ou d’une famille.

Certaines sont solitaires, d’autres vivent en communautés de dizaines à quelques centaines d’individus. Certaines nichent dans le sol, d’autres dans des débris végétaux tels que des branches creuses ou des souches en décomposition. 

Agapostemon virescens, l'Halicte vert ou Abeille verte
Agapostemons virescens – Crédit: Manoushka Larouche

Les guêpes, piqueuses, mais importantes

Moins populaires parce qu’elles se défendent plus farouchement, les guêpes sont malgré tout d’importantes pollinisatrices. 

On connaît les guêpes comme des prédatrices, mais elles chassent surtout pour fournir des protéines à leur progéniture en pleine croissance. Une fois adultes, elles se nourrissent de nectar (et parfois de nos restants de boissons sucrées). 

La guêpe, un pollinisateur
Crédit: Alvesgaspar, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons

Elles pollinisent un peu moins efficacement que les abeilles car elles sont moins poilues et accumulent donc un peu moins de pollen, mais leur contribution n’en est pas moins importante. 

Comme chez les abeilles, certaines guêpes vivent seules alors que d’autres vivent en colonie, et certaines nichent dans le sol alors que d’autres construisent des nids accrochés à des structures comme des branches d’arbres ou des toitures.

Les diptères, notamment la mouche, ben oui!

Les diptères sont des pollinisateurs particulièrement importants en altitude et dans les climats plus nordiques. Cet ordre englobe notamment les mouches et les moustiques. 

Un peu comme les guêpes, plusieurs de ces insectes se nourrissent principalement de nectar. 

En effet, saviez-vous que seuls les moustiques adultes femelles piquent? Un peu comme les guêpes, elles ont besoin des protéines qu’elles trouvent dans le sang pour pondre leurs œufs. Autrement, les moustiques mâles et femelles se nourrissent de nectar, surtout au crépuscule. 

Il faut avoir l’œil pour les repérer, mais les syrphes sont des pollinisateurs très communs dans nos jardins. Bien qu’elles soient inoffensives, ces mouches imitent à s’y méprendre abeilles et guêpes afin d’éloigner les prédateurs.

Les papillons de jour et de nuit

Bien qu’ils soient les vedettes du monde des insectes, les papillons ne sont pas de particulièrement bons pollinisateurs. Ils se posent habituellement sur le bord des fleurs et atteignent le nectar avec leur longue trompe, limitant ainsi leur contact avec le pollen. Ils voyagent toutefois sur de grandes distances et peuvent donc assurer un mélange génétique entre des populations éloignées.

Pollinisateur
Crédit: Charles-Olivier Bourque

Plus méconnus, certains papillons de nuit sont des pollinisateurs essentiels. 

En effet, il existe des fleurs qui ne s’ouvrent que le soir ou la nuit, et doivent donc être pollinisées par des visiteurs nocturnes. Ces fleurs sont généralement très odorantes et ont de larges pétales blancs pour être visibles dans la pénombre. 

Les papillons de nuit peuvent aussi compléter le travail des pollinisateurs de jour pour les fleurs qui sont ouvertes nuit et jour.

Les premiers pollinisateurs, les coléoptères

Des coléoptères à la recherche de nutritif pollen auraient peut-être été les premiers pollinisateurs, il y a environ 200 millions d’années.²  Aujourd’hui, les coléoptères pollinisateurs du Québec sont répartis parmi plusieurs familles, entre autres les cantharides, les lucioles, les scarabées, les longicornes, les nitidules et les clairons.³ 

coccinelle, coléoptère
Crédit: Manoushka Larouche

Sans oublier les oiseaux

Outre les insectes, certains oiseaux, et particulièrement les colibris, pollinisent aussi! 

Le pollen s’accroche sur leur bec et à leurs plumes alors qu’ils se promènent de fleur en fleur pour se nourrir de nectar. 

Contrairement à plusieurs autres pollinisateurs, les colibris n’ont pas un sens de l’odorat très développé et se servent donc surtout de leur vision. Ils préfèrent les fleurs en forme de trompette et aux couleurs contrastantes, surtout avec du rouge.

En conclusion

Malheureusement, plusieurs de ces pollinisateurs sont menacés. 

En Amérique du Nord, on estime que plus de la moitié des espèces d’abeilles indigènes sont en déclin, et que 1 sur 4 est considérée comme menacée d’extinction.⁵ Au niveau mondial, 40% des insectes pollinisateurs, particulièrement les abeilles et les papillons, sont menacés.⁶ 

Ces déclins sont causés par plusieurs facteurs qui s’amplifient mutuellement: 

  • utilisation de pesticides,
  • introduction de nouvelles maladies et de parasites, 
  • changements climatiques, 
  • compétition avec de nouvelles espèces introduites 
  • perte d’habitat causée par l’intensification de l’agriculture, la déforestation et l’urbanisation. 

Pour préserver cette biodiversité, il est essentiel d’offrir à ces pollinisateurs des habitats à l’abri de toutes ces menaces et où ils peuvent trouver ce dont ils ont besoin pour vivre et se reproduire. 

C’est pourquoi les aménagements de Polliflora portent une attention toute particulière à offrir une abondance de sources de nourriture et de lieux de nidification pour que des pollinisateurs de toutes sortes y trouvent leur compte. 

Sources:
¹ Étienne Normandin, Entomologiste à l’Université de Montréal
² Anastasopoulos, A. (2015, 19 mai). Beetles : Nature’s mess and soil pollinators. Nature Conservancy Canada. Consulté le 1 février 2022, à l’adresse https://www.natureconservancy.ca/en/blog/archive/beetles-natures-mess-and.html
³ Fallon, C. (2020, 16 juin). Notes from the Other Orders : Beetles as Pollinators. Xerces Society. Consulté le 1 février 2022, à l’adresse https://www.xerces.org/blog/notes-from-other-orders-beetles-as-pollinators
⁴ De Kiriline Lawrence, L. (2007). Le Colibri à gorge rubis. Faune et flore du pays. Consulté le 1 février 2022, à l’adresse https://www.hww.ca/fr/faune/oiseaux/le-colibri-a-gorge-rubis.html#sid4
⁵ Kopec, K., & Burd, L.A. (2017, février). Pollinators in Peril : A systematic status review of North American and Hawaiian native bees. Center for Biological Diversity. https://www.biologicaldiversity.org/campaigns/native_pollinators/pdfs/Pollinators_in_Peril.pdf
⁶ FAO’s Global Action on Pollination Services for Sustainable Agriculture. (s. d.). Food and Agriculture Organization of the United Nations. Consulté le 1 février 2022, à l’adresse https://www.fao.org/pollination/background/bees-and-other-pollinators/en/

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Photos : Charles-Olivier Bourque et Manoushka Larouche

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