Qui n’a jamais croisé une guêpe jaune au-dessus d’un pique-nique laissé sans surveillance ?
Dans l’imaginaire collectif, les guêpes, bien qu’elles soient aussi des pollinisatrices essentielles, sont souvent vues comme des insectes nuisibles. On les redoute pour leurs piqûres douloureuses, leurs nids dans nos installations et leur agressivité quand elles sont dérangées.
Et pourtant, cette perception est loin de la réalité ! Un monde sans guêpes serait bien différent… et pas en bien. Aujourd’hui, faisons la lumière sur ces guêpes mal-aimées et découvrons leur rôle essentiel dans notre environnement.
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« Guêpes jaunes », qui sont-elles ?
Quand on parle de « guêpe commune » ou de « guêpe jaune », à quoi fait-on référence exactement ?
Ces termes désignent les espèces de guêpes sociales appartenant à la sous-famille des Vespinae, plus communément appelés Vespines. Au Québec, on en compte 16 espèces, dont certaines sont bien connues, comme le frelon européen et la guêpe germanique, toutes deux introduites.
Les espèces les plus fréquemment mentionnées sont :
Ces guêpes se distinguent notamment par les motifs uniques qui ornent leur corps. Si vous observez de près leurs rayures et leurs couleurs, vous pourrez apprendre à identifier chacune de ces espèces plus facilement.
Est-ce bien une guêpe ?
En vol, les guêpes peuvent facilement être confondues avec les abeilles. Mais alors, comment les identifier ?
Environnement
On peut d’abord se fier à l’environnement dans lequel elles se trouvent :
- En général, les abeilles se nourrissent du nectar des fleurs et sont moins attirées par les pique-niques ou
les restes de nourriture. Aussi, les abeilles à miel sont moins enclines à piquer en réponse à une agression, puisqu’elles perdent leur dard après une seule piqûre et en meurent. - Les guêpes sont quant à elles omnivores et leurs larves carnivores, il y a donc plus de chances qu’on soit face à une guêpe lorsqu’on mange des aliments sucrés ou de la viande à l’extérieur.
Pilosité
De plus, une autre règle pour différencier les guêpes des abeilles présentes dans nos jardins est de regarder leur pilosité :
- Les abeilles sont recouvertes de séries de poils drus (appelés scopa) leur permettant de récolter du pollen, de percevoir les vibrations du milieu et de les garder au chaud.
- La plupart des abeilles peuvent rassembler le pollen sur leur corps et le stocker en vol. Pour Apis mellifera et les bourdons, il s’agit de corbeille de pollen (les corbiculas) sur la face extérieure de leurs pattes arrière.
- Pour les mégachiles, des abeilles indigènes, c’est sous leur abdomen, le colorant d’un jaune vif et poudreux.
Forme du corps
Au repos, on peut aussi se fier à la forme du corps pour différencier guêpes et abeilles :
- Alors que les abeilles et bourdons sont plus ronds, les guêpes sont effilées, aux grandes mandibules visibles et à la séparation de l’abdomen et du thorax définie (la fameuse taille de guêpe).
- Les ailes des abeilles sont également posées au repos sur le dessus du corps, alors que les guêpes les referment le long de leur abdomen.
Les guêpes, d’importants pollinisateurs
En réalité, les guêpes jouent, elles aussi, un rôle dans la pollinisation, bien que leur impact soit différent de celui des abeilles. Bien que leurs larves soient carnivores, les guêpes adultes sont omnivores et se nourrissent volontiers de nectar.
Ainsi, les fleurs qui attirent les guêpes sont souvent différentes de celles attirant les abeilles :
- Corolle peu profonde pour permettre aux parties buccales courtes de la guêpe d’atteindre le fond de la fleur,
- Un forte odeur fruitée émanant de la fleur,
- Des fleurs riches en nectar.
Des fleurs comme celles du persil, la monarde fistuleuse et de l’eupatoire maculée sont prisées des guêpes (blog.umd.edu).
Comme dans le cas des pollinisateurs, on dit que les guêpes, réalisent une pollinisation passive ou accidentelle : en butinant le nectar, elles transportent involontairement des grains de pollen sur leur corps.
Certaines orchidées dépendent spécifiquement des guêpes pour assurer leur reproduction. Elles sont capables d’imiter l’odeur et la silhouette de guêpes femelles pour inviter les mâles à s’y poser !
L’épipactis à larges feuilles (Epipactis helleborine) est une espèce européenne présente au Québec dépend de la pollinisation par les guêpes. Lorsqu’elle est grignotée par des insectes, la plante relâche naturellement un composé chimique alertant les prédateurs de la présence de proies comme des chenilles.
Epipactis helleborine est capable de produire ce composé, attirant ainsi des guêpes pollinisatrices ! (blog.umd.edu)
Une autre bonne raison de cohabiter
Des études démontrent que d’écraser une guêpe, et donc de casser son dard, libère une phéromone d’alarme alertant les autres membres de son nid (Florida Enthomologist). Afin d’éviter de se retrouver avec une armée mécontente de guêpes, ainsi que de permettre à la guêpe de poursuivre son service à la biodiversité, il vaut toujours mieux attraper et relâcher les guêpes qui s’aventurent dans les habitations..
Les guêpes : des alliées pour le contrôle des nuisibles
Les guêpes sont également de redoutables prédatrices d’autres insectes.
Puisque ses larves se nourrissent exclusivement de viande, la guêpe adulte chasse une multitude d’insectes pour ensuite les rapporter au nid.
Certaines guêpes solitaires, comme les guêpes maçonnes et potières, chassent des chenilles qu’elles paralysent et stockent vivantes dans leurs nids en forme de vase (souvent collées aux murs des maisons).
En conclusion, les guêpes occupent un rôle essentiel dans l’écosystème en tant que régulateur des populations d’insectes nuisibles pour l’agriculture ou les plantes ornementales. Un seul nid de Vespula vulgaris peut posséder près de 1000 ouvrières et chasser jusqu’à 8 kg de proies par hectare à chaque saison ! (Biological Reviews)
Guêpes et vin : une contribution insoupçonnée
Croyez-le ou non, la contribution des guêpes s’étend jusqu’à votre cave à vin !
En effet, le processus de fermentation des raisins en vignoble commence avec la levure, notamment Saccharomyces cerevisiae. Cette levure est ingérée par les guêpes qui se nourrissent de la chair du raisin, conservée dans leur corps et partagé par trophallaxie à ces congénères.
C’est alors que Saccharomyces cerevisiae ne peut exister que dans des environnements chauds et meurt donc à la fin de l’été. En hibernant, la reine des guêpes protège la levure, puis la retransmet dans les raisins chaque été, permettant ainsi la fabrication naturelle du vin en région froide.
Les guêpes sont précieuses pour l’écosystème
Loin d’être seulement des insectes « gênants », les guêpes jouent des rôles variés et cruciaux dans notre environnement : elles participent à la pollinisation, au contrôle des populations de nuisibles et même au cycle de la levure nécessaire pour le vin !
Ainsi, il est donc important de prendre soins de ce précieux pollinisateur, cliquez ici pour connaitre les solutions : Comment aider les abeilles et les pollinisateurs ?
Bonus : Depuis 2015, des études envisagent même l’utilisation de molécules actives dans le venin de la guêpe sociale Polybia paulista pour traiter le cancer (www.sciencedaily.com).
Comme quoi, on ne doit pas juger un insecte à son caractère !
Des questions ?
Si vous avez des questions, n’hésitez pas à nous contacter à info@polliflora.com.
Grissell, E.E. (2020, Avril). Yellowjackets and hornets. University of Florida.
Gouvernement de l’Ontario. (2023, 13 juin). Le frelon géant du nord.
Sumner, Seirian. (2021, 29 avril). Opinion: why I love wasps, and why you should too. UCL News.